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Une forte reprise de l'économie dans la région
de la CEE-ONU, mais inégalement répartie

La CEE-ONU publie son
Étude sur la situation économique de l’Europe 2004, no 2

Tous les éléments semblent être réunis pour que la croissance de l’économie mondiale se poursuive à un rythme soutenu au second semestre de 2004 et en 2005, telle est l’une des conclusions de l’Étude sur la situation économique de l’Europe que la Commission économique des Nations Unies pour l’Europe (CEE-ONU) vient de publier.

En 2004, le taux moyen de croissance de la production mondiale devrait être à peu près identique à celui du point le plus haut du cycle précédent en 2000, à savoir 4,7 %. Parmi les pays du G7, cette reprise est essentiellement entraînée par les économies des États-Unis, du Japon et du Royaume-Uni. À l’opposé, la faiblesse de la reprise en Allemagne, en France et en Italie ralentit la croissance dans la zone euro qui prend du retard sur le cycle de croissance international. Les marchés naissants d’Asie, de la Communauté d’États indépendants (CEI) et d’Europe orientale continuent à être d’importants moteurs de l’activité économique mondiale. Les ajustements qu’appellent les déséquilibres extérieurs globaux, les hauts niveaux d’endettement du secteur public et, dans certains pays, la bulle du marché immobilier font cependant toujours craindre d’importants risques de détérioration.

Une des caractéristiques majeures de la conjoncture au premier semestre 2004 a été la forte hausse des prix des matières premières, en particulier des cours du pétrole brut. Si la hausse des prix du pétrole risque de ralentir dans une certaine mesure l’activité économique dans le courant de l’année, jusqu’à présent elle n’a pas été sensiblement préjudiciable au rythme de la reprise mondiale. Étant donné leur plus forte dépendance à l’égard des importations de pétrole et leur plus faible efficacité énergétique, les pays émergeants importateurs nets et les pays en développement auront plus à souffrir de cette hausse que les pays industriels.

Forte croissance aux États-Unis et au Royaume-Uni, faible essor conjoncturel dans la zone euro

Aux États-Unis, la reprise devrait de plus en plus s’autoalimenter, la croissance de la production devant être supérieure au taux tendanciel, ce qui devrait permettre la poursuite des améliorations sur le marché du travail et le rattrapage de l’écart de production en 2005. En volume, le PIB devrait croître de 4,5 % environ en 2004, grâce à la vigueur de la demande intérieure et des exportations. La croissance devrait se ralentir dans le courant 2005, le taux annuel demeurant toutefois proche de 4 %.

Dans la zone euro, la reprise devrait demeurer modeste en 2004 et en 2005. Le PIB en volume devrait croître de 1,75 % environ en 2004 et de 2 % en 2005. Des taux de croissance aussi faibles ne permettent pas d’améliorations notables sur les marchés du travail. La reprise devrait continuer à être tirée par les exportations, elles-mêmes favorisées par la croissance dans les autres régions du monde. En fait, la vigueur des exportations a compensé l’effet de freinage de la hausse des prix du pétrole. La consommation des ménages ne devrait connaître qu’une croissance très modérée du fait du faible niveau de confiance des consommateurs et de la progression minime des revenus salariaux globaux à cause de la faiblesse de la demande de main-d’œuvre. La confiance des consommateurs est actuellement très inférieure à la moyenne à long terme, en raison de l’incertitude quant aux perspectives du marché du travail et des préoccupations à long terme touchant l’avenir des retraites et des services de santé. En conséquence, la propension à épargner est très forte. La meilleure tenue des exportations, associée à la faiblesse des taux d’intérêt devrait stimuler les achats de machines et d’outillages par les entreprises, en particulier en 2005.

En dehors de la zone euro, le PIB en volume du Royaume-Uni devrait progresser de quelque 3 % en 2004, soit un peu plus que le taux tendanciel qui se situe à 2,5 % par an. La reprise est alimentée par une forte croissance de la consommation des ménages et des dépenses des administrations publiques, mais les exportations devraient reprendre en 2005.

Pour l’ensemble des États membres de l’Union européenne (UE-25), le PIB en volume devrait progresser en moyenne de 2,2 % en 2004 et de 2,4 % en 2005. La faiblesse de ces chiffres masque des résultats sensiblement meilleurs dans les nouveaux États membres de l’UE (voir ci-après). Le taux de croissance moyen de l’ensemble plus vaste constitué par les pays d’Europe occidentale, centrale et orientale sera identique à celui de l’UE.

Les nouveaux membres de l’Union européenne maintiennent un rythme de croissance rapide

Dans les premiers mois de 2004, la croissance économique des nouveaux pays membres de l’UE s’est accélérée: forte reprise en Pologne et poursuite de l’essor de l’activité économique dans la région de la Baltique. Les nouveaux membres de l’UE devraient continuer à bénéficier de l’amélioration générale de la demande d’importation, tant au niveau mondial qu’en Europe occidentale. En 2004 comme en 2005, le PIB global de ces pays devrait croître de quelque 4,5 %, soit deux points de plus que celui de l’Europe des 15.

En Pologne, la croissance du PIB devrait rester forte, tant en 2004 qu’en 2005, entraînée par des exportations dynamiques. En Hongrie, le taux de croissance du PIB en 2004 devrait se situer entre 3,5 et 4 %. Les prévisions d’accélération de la croissance en Slovaquie pour 2004 et 2005 s’expliquent par une reprise attendue de la demande intérieure; une forte progression des exportations devrait par ailleurs continuer à soutenir l’activité économique. Les trois pays baltes continueront à connaître, selon toute vraisemblance, la plus forte croissance, aussi bien en 2004 qu’en 2005, grâce au dynamisme des exportations et à une demande intérieure vigoureuse. La croissance du PIB en République tchèque et en Slovénie devrait être un peu plus faible, aux alentours de 3,5 %, tant en 2004 qu’en 2005. En République tchèque, ce ralentissement relatif de l’activité économique traduit en partie les efforts des pouvoirs publics pour ramener le déficit du secteur public à un niveau plus supportable.

La croissance demeure forte en Europe du Sud Est…

La croissance économique en Europe du Sud Est devrait rester assez forte à court terme. Certains de ces pays attirent désormais les investissements directs étrangers (du fait en particulier de leur adhésion attendue à l’UE), ce qui a contribué à améliorer la tenue de leur économie. La croissance du PIB en Bulgarie et en Roumanie devrait continuer à avoisiner les 5 %, tant en 2004 qu’en 2005, soutenue par une forte demande intérieure et par la croissance des exportations. La forte reprise en Turquie reflète la santé foncière de l’économie et le regain de confiance des consommateurs et des investisseurs après le succès des efforts d’ajustement qui ont suivi la crise financière. La croissance du PIB turc pourrait atteindre 7 % en 2004. En Croatie, la croissance du PIB devrait se situer aux alentours de 4 %, en grande partie grâce aux exportations, car les réductions envisagées des dépenses publiques pèseront sur la croissance à court terme. Après un ralentissement en 2003, l’activité économique en Serbie et Monténégro s’est redressée au début de 2004 et la reprise devrait se poursuivre durant toute l’année grâce à une vive relance de la demande intérieure.

… et dans la CEI

La récente envolée des cours des matières premières, en particulier ceux du pétrole, a donné un très fort élan aux économies des pays de la CEI exportateurs de matières premières et à la région de la CEI dans son ensemble. Durant les premiers mois de l’année, la croissance économique de la région a été bien supérieure aux prévisions, ce qui a fréquemment amené à réviser en hausse les prévisions de croissance. À court terme, l’environnement extérieur devrait rester favorable aux exportateurs de matières premières et, en conséquence, la croissance économique des pays de la CEI restera forte jusqu’à la fin de 2005.

La Russie a beaucoup bénéficié non seulement des prix élevés du pétrole mais aussi d’une forte reprise de la demande mondiale de pétrole, ce qui explique en grande partie l’accélération de la croissance au début de 2004. De l’avis général, son PIB devrait croître de près de 7 % pour l’ensemble de l’année 2004, avant de ralentir à 5,7 % en 2005. De même, la croissance économique de l’Ukraine au premier semestre s’est révélée beaucoup plus forte qu’initialement attendu, grâce à un environnement mondial favorable pour ses principales exportations telles que l’acier et les produits chimiques. La croissance du PIB devrait se situer aux alentours de 8 à 9 %, bien au-dessus des estimations antérieures. Au Kazakhstan, autre grand exportateur de matières premières, la croissance du PIB devrait avoisiner les 10 % en 2004 et demeurer très élevée en 2005. Au Bélarus, la forte reprise de la production manufacturière tirée par les exportations devrait également contribuer à une solide croissance du PIB (6-7 %) pour l’ensemble de l’année 2004. Parmi les plus petits pays de la CEI, la croissance économique devrait rester élevée chez les pays exportateurs de matières premières, dont le PIB devrait progresser dans la plupart des cas de 8 à 9 % en 2004. Au contraire, pour les pays qui ne sont pas exportateurs de matières premières, tels que l’Arménie, la Géorgie, l’Ouzbékistan et la République de Moldova, le taux de croissance du PIB devrait, à court terme, demeurer inférieur à la moyenne de la CEI.

QUESTIONS DE POLITIQUE MACROÉCONOMIQUE

Abandon progressif des mesures de relance monétaire aux États-Unis…

Au premier semestre de 2004, les États-Unis ont continué à pratiquer une politique monétaire d’accompagnement marqué. L’objectif pour le taux des fonds fédéraux restait fixé à 1 % seulement depuis fin juin 2003, le taux le plus bas depuis 46 ans. Mais l’orientation de la politique monétaire a commencé à changer au second semestre de 2003 lorsque la reprise est devenue plus forte. En mai 2004, de plus en plus d’indicateurs confirmant un vif redressement de la production, une reprise dans le domaine de l’emploi et une faible hausse de l’inflation, le Comité de l’Open Market du système fédéral de réserve a commencé à préparer les marchés à une remontée des taux d’intérêt, en chute libre depuis le milieu de 2001. De fait, le 30 juin, la réserve fédérale a relevé d’un quart de point de pourcentage son objectif pour le taux des fonds fédéraux, le portant à 1,25 %. Il s’agit là d’un revirement de la politique monétaire aux États-Unis et pour l’ensemble de l’économie mondiale. Les taux d’intérêt réels à court terme sont toutefois demeurés négatifs. Au vu de la forte expansion prévue pour le reste de 2004 et en 2005, la réserve fédérale devra progressivement relever les taux d’intérêt de façon à redonner une orientation neutre à la politique monétaire, ce qui correspond, estime-t-on, à une fourchette comprise entre 4 et 4,5 % pour les taux à court terme.

… mais la politique budgétaire des États-Unis doit elle aussi être ajustée

La politique budgétaire des États-Unis devrait continuer à accompagner la croissance tout au long de 2004, quoique dans une mesure bien moindre qu’en 2003. Les revenus des ménages devraient être à nouveau stimulés par les remboursements d’impôts versés dont l’effet devrait toutefois diminuer au second semestre. Le déficit du budget des administrations publiques est passé de 3,3 % du PIB en 2002 à 4,8 % en 2003. À l’heure actuelle, on ne prévoit qu’une faible diminution du déficit budgétaire en 2004. La majeure partie de ce déficit serait de nature structurelle, c’est-à-dire qu’il ne devrait être qu’en partie absorbé au cours d’une reprise de la conjoncture. Cela souligne la nécessité d’une stratégie rigoureuse et cohérente d’assainissement des finances publiques à moyen terme.

Dans la zone euro, la politique monétaire peut être mise en veilleuse…

Dans la zone euro, la reprise est encore relativement fragile et dépend largement de la demande extérieure. Dans cette perspective et au vu du faible taux, actuel comme prévu, de l’inflation, la politique monétaire devrait rester en attente jusqu’à ce que la reprise soit plus forte, ce qui exige un renforcement soutenu de la demande intérieure. La hausse des prix du pétrole et le renchérissement consécutif des produits énergétiques ont entraîné une augmentation générale du niveau moyen des prix intérieurs. Ce qui devrait être inquiétant du point de vue de la politique monétaire, c’est toutefois ce que l’on appelle les effets indirects ou secondaires de cette hausse, à savoir les conséquences sur les coûts de production, en particulier les coûts de main-d’œuvre, qui pourraient provoquer une spirale inflationniste. De même qu’aux États-Unis, il n’y a jusqu’à présent aucune preuve d’une telle répercussion qui, en tout état de cause, étant donné la situation du marché du travail, les marges importantes de capacité disponibles et les pressions de la concurrence internationale, ne pourrait être que de très faible ampleur.

… alors que la politique budgétaire devrait privilégier un rééquilibrage à moyen terme

Dans la zone euro, la politique budgétaire devrait être sans incidence en 2004, comme il appert de la projection d’un solde budgétaire inchangé, correction faite des influences conjoncturelles. Toutefois, les déficits de six pays (Allemagne, France, Grèce, Italie, Pays-Bas, Portugal) seront excessifs, c’est-à-dire qu’ils dépasseront le seuil de 3 % prévu par le Pacte de stabilité et de croissance. L’Allemagne et la France perceront le plafond des 3 % du déficit budgétaire pour la troisième année consécutive en 2004.

La crise à laquelle a donné lieu la mise en œuvre du Pacte de stabilité et de croissance en 2003 a provoqué d’intenses discussions sur les éventuels moyens de le réformer. Pour l’instant, il n’y a pas de position officielle définitive en la matière, du fait de l’absence de consensus entre les États membres de l’UE. La Commission européenne a toutefois récemment esquissé les principaux éléments d’un renforcement possible et d’une clarification du Pacte, dont les règles seraient par ailleurs assouplies. La situation budgétaire actuelle de plusieurs pays membres de la zone euro, en particulier les trois principaux, donne à penser que la marge de manœuvre de la politique budgétaire est désormais quasiment réduite au fonctionnement des stabilisateurs automatiques. À présent, il s’agit principalement de mettre au point des stratégies d’assainissement des finances publiques pour assurer leur viabilité à moyen et à long terme sans limiter le fonctionnement des stabilisateurs automatiques.

La zone euro a besoin d’un assortiment de mesures de soutien

Il importe de souligner que les politiques macroéconomiques et les réformes structurelles sont complémentaires et non pas interchangeables. De toute évidence, il faut privilégier davantage l’innovation, accroître les investissements en capital humain, relancer la recherche fondamentale et continuer à réformer les marchés du travail afin de relever le taux de la croissance potentielle. Tout cela peut être fait de manière beaucoup plus efficace dans un contexte de croissance économique soutenue, appuyé par des politiques macroéconomiques favorables. Les propositions visant à assouplir l’interprétation du Pacte de stabilité et de croissance vont donc dans la bonne direction. La question essentielle à court terme est de savoir si la reprise par les exportations va s’élargir et avoir des effets sur la demande intérieure. Étant donné que la politique budgétaire privilégiera l’assainissement des finances publiques, la politique monétaire aura un rôle important à jouer par la mise en place d’un assortiment de mesures de soutien.

Les risques inflationnistes poussent à un resserrement de la politique monétaire au Royaume-Uni

Le Royaume-Uni a à nouveau durci sa politique monétaire au premier semestre 2004. Au vu des prévisions de croissance supérieures à la tendance et des tensions qui en résultent sur la capacité de production et les prix, le Comité de politique monétaire de la Banque d’Angleterre s’est en effet inquiété des risques de dépassement de l’objectif d’inflation à moyen terme fixé par le Gouvernement. Une préoccupation majeure de politique monétaire demeure la poursuite de la hausse des prix de l’immobilier que l’on considère généralement comme une «bulle» spéculative. L’endettement des ménages est parvenu à un niveau très élevé (environ 100 % du PIB, soit 120 % du revenu disponible). Les finances publiques se sont sensiblement détériorées en 2003 par suite d’une forte augmentation des dépenses de l’État pour soutenir l’activité économique et contrebalancer par là le ralentissement conjoncturel de 2002. Le déficit budgétaire effectif s’est élevé à 3,2 % du PIB, soit deux fois plus qu’en 2002. La politique budgétaire devrait demeurer neutre en 2004 et le déficit budgétaire observé retomber en dessous de la limite de 3 % fixée par l’UE.

Les nouveaux membres de l’UE fixent des critères de convergence…

Après leur adhésion, les nouveaux membres de l’UE ont automatiquement assumé les obligations du Pacte de stabilité et de croissance, notamment les règles et normes du cadre de politique budgétaire de l’Union. Ils doivent par ailleurs soumettre à la Commission européenne des programmes de stabilité et de convergence qui définissent les politiques qu’ils entendent suivre afin d’atteindre les objectifs du Pacte.

Pour certains de ces pays, l’un des objectifs les plus difficiles à atteindre sera le nécessaire rééquilibrage des finances publiques. En 2003, le déficit des administrations publiques de quatre pays d’Europe centrale - Hongrie, Pologne, République tchèque et Slovaquie - a dépassé la valeur de référence de 3 % du PIB fixée par l’UE. D’après leurs programmes sur les politiques à moyen terme, ces pays veulent éliminer les déficits budgétaires «excessifs» d’ici à 2006 2008. Toutefois, pareil assainissement exigera des mesures d’ajustement douloureuses qui, à l’exception de la Pologne, sont déjà en cours.

Étant donné que de nombreux nouveaux membres de l’UE procèdent encore actuellement à d’importants ajustements structurels, la Commission européenne semble avoir adopté une attitude plus souple à l’égard de leurs actuels déficits budgétaires. Il est probable que ceux qui doivent faire face à de sérieuses difficultés structurelles se verront accorder (quoique de façon informelle) une période de grâce pour se conformer aux règles rigoureuses du Pacte. Toutefois, une telle déviation tacite des règles budgétaires générales de l’UE ne fait que souligner à nouveau les difficultés de leur respect, difficultés qui proviennent, du moins en partie, de leur rigidité excessive. Il serait sans doute préférable de modifier ces règles pour laisser une plus grande marge de manœuvre aux responsables des pays face aux ajustements tant conjoncturels que structurels à long terme.

… et préparent leur entrée dans l’Union économique et monétaire

Trois pays - l’Estonie, la Lituanie et la Slovénie - ont adhéré au nouveau mécanisme de taux de change de l’UE dès juin 2004, immédiatement après leur adhésion. Ces pays seront peut-être prêts à adopter l’euro fin 2006 ou au début de 2007, mais les autres nouveaux membres ont, semble-t-il, abandonné leur précédent calendrier ambitieux d’adhésion à l’Union économique et monétaire. Ainsi, la Hongrie et la République tchèque semblent ne vouloir désormais adhérer au mécanisme qu’en 2008 et adopter l’euro en 2010. La Banque nationale de Pologne a également modifié sa date officielle d’entrée dans la zone euro, passée de «2007» à «aussitôt que possible après 2007»; le Gouvernement polonais se montre encore plus prudent quant à une éventuelle date d’adhésion. La Lettonie et la Slovaquie semblent vouloir adhérer à l’Union économique et monétaire en 2008.

La CEI face aux risques de surchauffe…

L’actuelle phase de haute conjoncture que connaît la région de la CEI, et dont ses pays tirent le plus grand profit, n’est pas sans poser de nouveaux défis à l’action gouvernementale. Dans certains cas, cette croissance rapide s’est accompagnée d’une montée des tensions inflationnistes, faisant ainsi craindre une surchauffe. Les risques inflationnistes sont parfois aggravés par un essor des entrées de capitaux, essentiellement du fait du niveau élevé des recettes d’exportation. Une telle situation exige une stratégie prudente et équilibrée. Par exemple, dans une telle situation, relever les taux d’intérêt pourrait conduire à attirer davantage de capitaux, aggravant ainsi la situation macroéconomique. Face au risque combiné de surchauffe et d’appréciation du taux de change, les pouvoirs publics seraient mieux inspirés de recourir à la politique budgétaire, par exemple en lui donnant une orientation plus restrictive, tout en conservant une politique monétaire neutre.

… et aux risques de «maladie hollandaise» en Russie

Alors que l’économie russe dans son ensemble bénéficie sans aucun doute d’un supplément de recettes inattendu à cause de la hausse des prix du pétrole, la Banque centrale doit faire actuellement face à de graves dilemmes de politique macroéconomique. En Russie, les symptômes de la «maladie hollandaise» sont de plus en plus visibles et la tendance à l’appréciation du taux de change s’est intensifiée ces deux dernières années. L’appréciation du rouble est désormais telle qu’elle peut sérieusement nuire à la compétitivité des producteurs du pays et devient de toute évidence une charge pour l’économie dans son ensemble.

Les efforts récemment tentés pour faire face à ce problème font ressortir la complexité des décisions à prendre, en particulier dans un environnement de marchés financiers embryonnaires et relativement inconsistants. Au premier semestre 2004, la Banque centrale russe a continué ses achats massifs de devises étrangères afin d’éviter que l’appréciation du taux de change réel ne s’accélère davantage. Toutefois, l’importante injection de liquidités sur le marché monétaire intérieur a eu des effets secondaires préjudiciables, non seulement en favorisant l’inflation, mais aussi du point de vue de l’efficacité de la gestion macroéconomique proprement dite, en particulier la politique des taux d’intérêt de la Banque centrale.

Il n’existe pas de remède simple à la «maladie hollandaise». L’un des objectifs de la politique macroéconomique devrait être de prévenir une éventuelle surréaction du taux de change réel, dans la mesure où un taux très élevé risque de provoquer la suppression d’emplois et l’élimination d’entreprises qui, au taux d’équilibre, seraient parfaitement viables. En outre, pour demeurer compétitives, les entreprises locales doivent se restructurer pour accroître leur productivité et leurs marges bénéficiaires. Mais cela requiert l’instauration d’un environnement marchand qui permette aux entreprises de répondre aux signaux du marché. En particulier, cela suppose une réduction des obstacles à la concurrence sur les marchés du produit intérieur, du travail et du capital et une plus grande flexibilité de ces marchés. À long terme, la solution consiste à diversifier l’économie pour réduire sa dépendance vis-à-vis des exportations de ressources naturelles. Pour réaliser son potentiel de croissance à long terme, la Russie doit donc accélérer et approfondir les réformes systémiques et structurelles.

S’employer à résoudre ces problèmes devrait donc figurer au premier rang des préoccupations du Gouvernement russe. Un appareil productif plus large, plus solide et plus compétitif réduirait non seulement la dépendance de l’économie russe vis-à-vis des secteurs du pétrole et du gaz mais aussi sa vulnérabilité aux fluctuations des prix internationaux des ressources naturelles. À des degrés divers, les mêmes questions (et leurs implications pour les orientations de la politique générale) intéressent également les autres pays de la CEI - par exemple, l’Azerbaïdjan, le Kazakhstan, le Tadjikistan, le Turkménistan et, dans une certaine mesure, l’Ukraine - qui s’efforcent de réduire leur dépendance à l’égard des exportations de matières premières.

LES RISQUES DE BAISSE CONJONCTURELLE ET LES INCERTITUDES DEMEURENT IMPORTANTS

Après avoir atteint un sommet légèrement inférieur à 40 dollars p/b (prix du brut de Brent sur le marché libre), les cours du pétrole ont reflué au début de juin 2004. Le cours moyen mensuel s’élevait à 33,7 dollars en juin 2004. Au premier semestre de l’année, il était de 33,7 dollars p/b, en hausse de quelque 5 dollars p/b par rapport à la période correspondante de l’année précédente. Si l’on suppose une hausse analogue pour l’ensemble de l’année, le relèvement des prix du pétrole n’aurait qu’une incidence relativement faible et compensée par la forte reprise du cycle économique. L’incertitude demeure cependant quant à d’éventuelles attaques terroristes sur les principaux réseaux de transport du pétrole au Moyen-Orient, qui pousseraient les prix à la hausse, y compris les primes de risque.

Un autre risque provient du fait qu’une accentuation plus forte que prévu des tensions inflationnistes du fait du rattrapage rapide de l’écart de production mondiale pourrait entraîner un resserrement de la politique monétaire plus net qu’anticipé, en particulier aux États-Unis. Dans ce dernier pays, on s’attend généralement à un relèvement progressif des taux d’intérêt. On suppose, ce faisant, que la menace d’inflation restera maîtrisée, en partie grâce à la croissance de la productivité. Un resserrement de la politique monétaire aux États-Unis plus sévère que prévu pourrait y peser sur les marchés des actions, des obligations et de l’immobilier et avoir des répercussions négatives sur le patrimoine net des ménages et les conditions de financement intérieur. Il aurait également des retombées négatives sur les conditions de financement offertes aux marchés émergents qui se traduiraient par un élargissement des marges et par le tassement de l’activité économique.

Au fur et à mesure que l’on prend conscience de la gageure qui consisterait, pour les pouvoirs publics des grands pays, à mettre fin à la détérioration récente de leurs finances publiques, même dans un environnement de croissance durable et plus forte, une tension générale sur les taux d’intérêt à long terme pourrait se faire davantage sentir sur les marchés internationaux des obligations. Faute d’efforts résolus pour assurer la viabilité des finances publiques, les rendements des obligations pourraient augmenter suite à la hausse des primes de risque, ralentissant ainsi les investissements du secteur privé.

Le principal risque de baisse conjoncturelle demeure toutefois l’énorme déficit des paiements courants des États-Unis. On admet généralement que ce déséquilibre n’est pas soutenable et devra dès lors être ramené à des niveaux «normaux» à moyen terme. La situation économique actuelle n’est toutefois pas favorable à des progrès en ce sens, pour autant qu’ils soient envisageables en 2004 et en 2005. La condition élémentaire d’un redressement de la balance des paiements courants est une baisse sensible du dollar pour réduire l’absorption interne (les produits étrangers étant remplacés dans les dépenses par des produits intérieurs), conjuguée à une croissance plus forte de la demande extérieure pour les produits des États-Unis. Le récent ajustement du taux de change effectif réel depuis le début 2002 a toutefois été en partie inversé au premier semestre 2004. Le fardeau de l’ajustement est jusqu’à présent tombé en majeure partie sur l’Europe, étant donné les politiques de taux de change appliquées par les pays d’Asie. La croissance de la demande intérieure au Japon et dans la zone euro devrait en outre demeurer inférieure à celle des États-Unis. Dans ces conditions, on ne peut pas exclure d’importants bouleversements de la structure des taux de change: ils pourraient être provoqués par des modifications brutales de l’état d’esprit des opérateurs et de la confiance des investisseurs, ce qui serait préjudiciable à la reprise au Japon et dans la zone euro.

TABLEAU 3.1
Variations annuelles du PIB réel en Europe, en Amérique du Nord
et au Japon, 2002-2005
(Pourcentage de variation par rapport à l’année précédente)
TABLEAU 3.2
Variations annuelles du PIB réel en Europe du Sud-Est
et dans la CEI, 2002-2005
(Pourcentage de variation par rapport à l’année précédente)
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Ref. ECE/GEN/04/P12